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Chercheuse

Chris Younès

Philosophe / Fondatrice du Gerphau / Docteure en Philosophie / HDR
Psychosociologue, docteure et HDR en philosophie, actuellement professeure à l’ESA (Paris), Chris Younès est fondatrice et membre du laboratoire Gerphau (EA 7486), du réseau PhilAU (Philosophie, architecture, urbain) et de sa revue Le Philotope. Cofondatrice et membre d’ARENA (european architectural research network), membre du conseil scientifique d’Europan, membre de l’académie d’Architecture et correspondante section architecture de l’académie des Beaux-Arts.

Présentation

Membre de plusieurs concours d’architecture-urbanisme-paysage, auteure de plusieurs ouvrages et préfaces, elle donne de nombreuses conférences en France et à l’étranger. Ses publications et recherches développent une interface synergique architecture et philosophie sur la question des lieux de l’habiter, au point de rencontre entre nature et artefact, patrimoine et création.

Elle a signé notamment Architectures de l’existence. Éthique. Esthétique. Politique (Hermann, 2018) et codirigé récemment Prendre soin. Architecture et philosophie (Infolio, 2024).

Travaux

De la maison, de l’ « être jeté » au dehors et du retour, l’homme habitant la terre participe au même drame originel : les « manières d’apparaître » et les « manières de disparaître » relèvent d’une existentialité, celle d’un devenir-humain et d’un devenir-monde. 

De la maison ronde creusée dans le sol, jusqu’au logement comme forme historiquement tardive de l’habitation, le mode d’existence fondamental de l’homme sur la terre est celui de demeurer sous un toit comme principe essentiel de l’habiter où il y a encore possibilité de se blottir dans une intimité propre. « N’habite avec intensité que celui qui a su se blottir » écrit Bachelard dans La poétique de lespace pour insister sur l’importance d’espace plié vers le dedans qui ne cesse de se déplier et se replier vers l’infini révélant le concept de l’enveloppant-enveloppé. 

C’est le schéma raciner (naître) – dé-raciner (partir) – dé-placer (risque, danger) – en-raciner (revenir) qui articule l’homme à la terre qu’il habite selon un certain rythme de déchirures intimes et douloureuses. Ce moment entre naissance/re-naissance est traversé par une « déhiscence » envers des limites-ouvertures qui s’articulent dans une fusion ontologique entre l’homme, l’habitation humaine et le milieu sur laquelle surgissent des lointains possibles et désirables. Dans cet arrachement à la maison, dans l’inquiétant dehors, à l’épreuve du fragile, l’homme habitant la terre ouvre dans la continuité de l’habiter à un prendre soin des vulnérabilités partagées dans sa ville inquiète : pardon difficile, promesse fragile et deuil impossible.

Régénérer Paris

wildproject et Pavillon de l'Arsenal - 2021

Architectures of Existence proposes that philosophical thinking (ecosophical thinking) can inform the way we engage with our world and its inhabitants, as architects, designers and planners, but also as individuals, as people, and as a society.

In Art et existence, Maldiney states: « For us, to inhabit is to exist ». This book aims to unfold, extend, articulate and thicken this postulate by interweaving architecture, city, landscape, literature and philosophy. It takes up the synergistic lines of long-term research carried out from an ecosophical perspective. Such an attitude explores an art of existing in multiplicity, singularity and openness, manifesting the critical dimension through a reinterpretation of the knotting of the trajectories of time, humanity and its becoming. Insisting on what is between things and beings as well as on what is happening, regenerating, recycling, reviving, saving, diversifying, sparing, recreating, meditating: and so caring. These are all eco-rhythms of a different type between human and non-human, to consider ourselves in the world. In an era of uncertainty and climate threats, this book develops the margins of possibility offered by the subject of architecture.

This book will be of interest to researchers and students of architecture, urban planning and philosophy.

120 pages
ISBN: 9781032464442

In the newest episode of A is for Architecture, Professor Chris Younès – philosopher, professor emerita at the National School of Architecture of Paris-La Villette and the École Spéciale d’Architecture, a Silver Medalist of the Academy of Architecture in 2005 and Chevalier de la Légion d’Honneur in 2014 – discusses the 2024 edition of her book, Architectures of Existence: Ethics, Aesthetics, Politics (Routledge), translated by Cozette Griffin.

Building around the notion of [an] ecosophy, Chris explores how the spaces we inhabit shape our identities, experiences, and relationships with both human and non-human worlds. In an era of intersecting crises and social fragmentation, driven by the systems we’ve built to sustain our way of life—can architecture help us reimagine how we live together?

Genuinely, Chris is amazing to listen to, so please do.

Every morning brings us news from across the globe, yet we are poor in noteworthy stories.

– Walter Benjamin, ‘The Storyteller’ (1936)

How might architectural theory move closer to architectural practice without losing its critical autonomy? How might it be more responsive to the changing needs of society? A possible answer may be found in the architectural discourse of the British architect, Cedric Price (1934- 2003) and his concern for the social efficacy of theory. Although Price is most often remembered in terms of his architectural designs, he was also a highly respected architectural journalist, critic, writer, lecturer, scholar, educator and polemicist. Price actively engaged architectural theory not only in what he wrote or said, but also in the proximity that he developed toward his readers and his audience. Through his dialogic sensibility and his emphasis on participation and process, Price’s ‘public’ became an integral actor in the production of theory —a ‘co-author’ so to speak. The link between theory and social action was also a critical issue for Walter Benjamin for whom modernity could be understood as a crisis of human experience and communication. In his essay, ‘The Storyteller’, Benjamin contrasts the collective assimilation of experience and memory through storytelling to the privatised subject of bourgeois literacy and the ‘empty’ temporality of modern news. Here Benjamin explores two fundamentally different notions of experience: integrated social ‘lived’ experience (Erfahrung) and immediate private ‘living’ experience (Erlebnis). The atrophy of modern experience could be characterized as a radical shift towards the latter accelerated by the trauma of warfare and the rise of the information industry. Set against the increasing ‘distance’ that mass media had opened up in the language of experience, Benjamin proposed the concept of nearness as a possible strategy to recover the communal intimacy that he perceived in the anecdotal forms of oral culture. Following Benjamin’s concept of nearness, this paper examines how Price’s architectural discourse —and his production as a journalist in particular— may define a modern form of storytelling practice, one that attempts to represent experience with the immediacy of news discourse, thus reopening some of the fundamental dichotomies underlying Benjamin’s theory of experience. Indeed reporters ‘make’ stories and the ‘making’ of stories involves play and critical imagination. This paper argues that Price’s early involvement in journalism (television, radio, magazines) was crucial not only to his engagement with language but to the development of his dialogic approach to architecture in general. In so doing, this paper aims to offer a possible response to the contemporary challenge of how architectural theory might enter into a more effective dialogue with design practice and society at large in order to reclaim its critical role in the advancement of architectural culture.

S’accorder en architecture

De l'invention en architecture. Initier, Situer, Durer Éditions 205 - 2024

Postface du livre

Collection «AAA…»

Que veut — encore — dire inventer pour un architecte aujourd’hui dans le paysage troublé de l’Anthropocène? Et cette invention en architecture, si elle existe, en quoi se distingue-t-elle d’autres modes inventifs?

Alors que la crise de l’habitabilité du monde est patente, la notion d’invention, commune à la philosophie et à l’architecture, se voit actuellement réinterrogée selon d’autres coordonnées. La nouveauté que l’on attend de toute invention — et il nous faut bien, peut-être plus encore aujourd’hui, inventer, créer, imaginer pour ré-habiter — ne peut plus, sauf à produire de nouvelles dévastations, s’opérer sur la base d’une destruction, d’une invisibilisation, d’une simplification.

Mais comment rouvrir le sens du geste inventif autrement que l’a fait le “front de modernisation”? La modernisation, en effet, a capté le sens de l’invention, lui assignant une orientation et  l’associant à un mouvement d’arrachement, de rupture, ne pouvant opérer que dans la violence condamnant tout héritage: héritages physique et culturel, expériences vécues, manières communes de pensée. Le sens du geste inventif s’est constitué non seulement comme puissance de faire apparaître du nouveau, mais aussi, corrélativement, comme puissance de dévaluer l’existant, lui faisant perdre son importance et sa résistance intrinsèque, pour pouvoir ensuite lui substituer d’autres réalités, d’autres objets et d’autres histoires.

Partons d’une hypothèse: l’habitabilité du monde, qu’il s’agit pourtant d’inventer, ne dépend pas de nous, ou si elle en dépend, c’est sur un autre mode que celui qui consiste à la produire de toute pièce…

Préface

Chris Younès et Michal Bogár
Lignes directes / Priame Spoje / Paris – Bratislava - 2024

Ce livre nous dévoile Paris et Bratislava, deux capitales en dialogue, tissées de fils invisibles à travers l’objectif de Michal Bogár, architecte et urbaniste. Chaque image ne dit que l’essentiel : ville, lieu, date et heure, laissant au lecteur le soin de déceler l’œuvre.

Les formes plastiques s’y révèlent, dans les lignes des édifices comme dans les courbes des sculptures, écho du temps qui s’écoule. Les volumes et perspectives, mais aussi les ambiances et gestes, se déploient devant nous. Ce voyage ne nous mène pas aux objets de la ville, mais aux milieux habités, où la présence humaine ne se contente pas de donner l’échelle ; elle nous embarque dans un monde où l’ordinaire côtoie l’insolite.

Une urbanité sensible se raconte, imprégnée de situations mouvantes, rythmées par un ballet incessant de lignes, d’angles et de courbes. L’œil s’attarde sur ces dynamiques, où le noir, le blanc et le gris sculptent ombre et lumière, plein et vide, matière et évanescence, et magnifient la cité qui s’ouvre sur des horizons multiples, accueillant les décalages.

Rencontres d’un nouveau type

Chris Younès
dir. Sandrine Israël-Jost et Katrin Gattinger
Arts et ruses, animaux et milieux, tome 2 : Katrin Gattinger: Plan B La Lettre Volée - 2025

Les violences ordinaires, presqu’intégrées dans le paysage de la ville par les barrières, murs, frontières, associées aux chorégraphies et transgressions gestuelles sous-tendent tout un pan du travail de Katrin Gattinger dont la conscience politique est transversale, que ce soit par la mise en évidence du design défensif urbain s’exerçant à l’encontre des êtres vivants, par l’écriture de textes critiques, mais aussi par l’importance accordée à un pistage s’apparentant à une quête initiatique.

in Sandrine Israël-Jost, Katrin Gattinger (dir.), Arts et ruses, animaux et milieux, tome 2 : Katrin Gattinger: Plan B, La Lettre Volée, 2025. 

Métamorphoses des représentations et des manières de faire monde avec les animaux

Chris Younès
dir. Sandrine Israël-Jost et Katrin Gattinger
Arts et ruses, animaux et milieux, tome 1 : Inventions animales d'espaces habitables La Lettre Volée - 2025

 

Il est indéniable que réenvisager l’habiter, le bâtir, le penser, en liaison avec le vivant et ses milieux naturo-culturels, fournit un nouvel élan à la fabrique des établissements humains. Des relations mouvantes entre les êtres humains et les autres espèces, corrélées au règne minéral, se développent dans une dynamique d’échanges et de transformations. C’est ainsi participer à une totalité vivante amenant à conjuguer dans une même pensée les liens et les lieux, les gestes et les écosystèmes, le stable et l’instable. Cette fabrique bio-territoriale conduit à interroger et reconnaître, comme l’a amorcé Donna Haraway, un ensemble systémique de parenté et de coproduction. Le vivant amène donc à mettre l’accent sur la question d’un devenir au sein duquel tout interagit, coévolue et se construit. Ce qui va à l’encontre d’une conception de la nature abstraite et distanciée de l’être humain. Carolyn Merchant a été une des pionnières de l’identification de la rupture qui a eu lieu entre le XVIe et le XVIIe siècle dans la manière de représenter la nature comme un univers mécaniste inerte obéissant à des lois immuables, duquel il était possible de se distancier. Cette objectivation est associée à une posture d’exploitation de la Terre et au développement d’un système socio-économique de domination incluant la nature et les femmes.

– Anthropisation et récits de milieux habités
– « Des profondeurs de nos cavernes »
– Cohabiter avec les animaux
– Amor mundi et surgissement existentiel

in Sandrine Israël-Jost, Katrin Gattinger (dir.), Arts et ruses, animaux et milieux, tome 1 : Inventions animales d’espaces habitables, La Lettre Volée, 2025.

Vivre avec les aléas

Living with... / Vivre avec... Catalogue du Pavillon français de la Biennale d'architecture de Venise 2025 Flammarion - 2025

Comment affronter des futurs incertains menacés et menaçants ? Dans un monde troublé en péril où les aléas – climatiques, environnementaux, sociaux, culturels ou technologiques – façonnent notre quotidien, l’architecture est amenée à se repositionner et s’orienter par rapport à la complexité des cycles élémentaux (eau, air, terre, feu) et des milieux vivants sous influence technique : le temps des ressourcements, le sursaut de projets adaptatifs régénératifs, vers une boussole de laboratoires de possibles.

Comment répondre au grand défi du pacte inaliénable d’hospitalité dans l’épopée de l’humanité alors que se multiplient les refus, les rejets, les murs, les enclaves et les camps à l’encontre des déplacés, des migrants fuyant des conditions de vie insupportables ? Le journaliste écrivain Éric Fottorino, engagé sur ces questions, en vient à dénoncer des états « devenus cannibales » et les « crimes d’indifférence ». Rappelons qu’a été édicté en République française fondée sur les principes indivisibles de liberté, égalité, fraternité, un délit d’hospitalité ! Par quels récits, imaginaires et alliances résister alors à l’immonde ? Quelle boussole existentielle dans l’incertitude, la désorientation et la désolation ? Quels nouveaux terrains d’entente pour accueillir l’autre ?
« Abriter l’autre homme chez soi, tolérer la présence des sans-terre et des sans-domicile sur un “sol ancestral” si jalousement, si méchamment aimé, est-ce le critère de l’humain ? Sans conteste » déclare le philosophe Levinas pour qui faire acte d’hospitalité, c’est accueillir de manière absolue le visage de l’autre dans son altérité irréductible et infinie, lui redonner un visage – difficulté extrême qui sollicite le propre de l’humain. « L’autre me regarde » écrit-il.

 

 

Conférence plénière dans le cadre de la 12ème édition ICH intitulé Le sensible en ville : ambiances et environnements, à l’université de Montpellier Paul-Valéry.

Conférences lors de la rencontre Architecture et philosophie, invitée dans le cadre des enseignements de licence 3.

L’intervention met en perspective des reprises et rebonds en termes de cohabitation et ressourcement existentiel. Avec un nouvel imaginaire symbiotique et sy- nergique visant à rééquilibrer les impacts de l’anthropisation et à réactiver les conditions de coexistence, une écobifurcation d’un nouveau type est amorcée : quelles émergences de possibles à partir des vulnérabilités des territoires ? Quelles humanités écologiques ? Quel art de liens régénéra- teurs ? Quel art d’habiter et cohabiter ?

Conférence donnée à à l’ENSA de Nantes dans le cadre des Rencontres de Sophie, sur la thématique « féminin / masculin ? » à l’ENSA de Nantes.

Résumé de la conférence à ajouter ?

Sur près de dix ans (1987-1997), le philosophe français Jacques Derrida a été invité à plusieurs reprises sur les lieux de l’architecture. Sollicité pour des colloques, des conférences, des publications, et au fil des rencontres et discussions avec les architectes, son propre positionnement s’est affirmé, transformant l’insécurité préalable de son incompétence pour/sur architecture en condition nécessaire de leur rencontre. Mais surtout, ce qui s’est sensiblement déplacé, c’est ce que le philosophe tenait à leur dire à ces architectes qui ont invité la déconstruction dans leurs discours et pratiques. Après plusieurs années à travailler et discuter à leurs côtés, Derrida déplace les enjeux conceptuels et/ou formels vers d’autres questionnements. Il ré-oriente leurs explorations esthétiques et/ou théoriques de la déconstruction en architecture vers une autre considération qu’il présente désormais comme aussi urgente que nécessaire : le ré-engagement de leur responsabilité politique. Cet article propose une remise en récit multi-topique (Los Angeles 1991 ; Yufuin 1992 ; New York 1988 ; Madrid 1997) qui entremêle les fils de l’histoire et des discours pour donner à voir et à penser sous un nouveau jour comment s’est noué la question du politique dans la rencontre de Derrida avec l’architecture. Il s’agit d’interroger comment, entre architecture et déconstruction, les amours s’épuisent quand elles font naitre la question du politique. Suivre dans les discours cet appel à la repolitisation veut mettre en avant que la déconstruction ne pouvait se contenter d’être une philosophie appliquée à l’architecture, et encore moins une application/interprétation plastique et formelle.

Depuis 30 ans, trois évolutions importantes ont participé à la transformation du monde, modifiant la réalité sociale, les modes de vie des populations et les formes urbaines. L’intensification de la mondialisation sous la domination du néolibéralisme, la naissance puis la diffusion dans tous les lieux et au contact de chacun de technologies numériques et d’outils informatiques, enfin la reconnaissance des responsabilités humaines sur les dérèglements environnementaux, et l’émergence de la notion d’Anthropocène.

Ces trois évènements ont évidemment influencé les pensées et pratiques de l’architecture, mais aussi son rôle dans les sociétés et plus largement ce que l’on attend d’elle.

S’il convient de prendre la mesure de cette dégradation de l’habitabilité humaine de la planète, sans doute est-ce pour initier des projets qui se fondent sur des modes de pensée et d’action bien différents que ceux qui ont produit cette détérioration, car les dynamiques de destruction et de co-génération des milieux ne sont simplement pas réversibles : elles ne sont pas de même nature.

D’où la nécessité d’enquêter sur les spécificités d’une architecture adaptée aux temps menaçants de l’Anthropocène.

L’oubli de l’air de Luce Irigaray fait apparaître l’air, milieu total, étendue infinie, air traversé et traversant. De ce lieu, milieu, étendue, nous faisons l’expérience en tant qu’humains. Dans ce milieu, nous habitons. Ainsi, Luce Irigaray dévoile l’air. Si elle n’entre pas directement dans le champ de la pratique architecturale, nous percevons à travers son ouvrage, des images spatiales qui ouvrent à des considérations manipulables en architecture. Nous faisons l’hypothèse qu’à travers sa lecture, l’air pourrait incarner un lieu de relations littérales comme disciplinaires, entre pensées philosophiques, esthétiques, politiques, tissées autour de l’architecture.

Un jour de noce avec la monde

Géométrie, mesure du monde La Découverte - 2005

Plus qu‘à la mesure impartiale des objets qu’une certaine géométrie utilise pour intervenir sur l’espace, nous nous intéresserons dans les pages qui suivent, à la mesure de notre relation aux lieux. Nous retournerons pour cela au contact de la lumière méditerranéenne, non pas celle qui baigne le Parthénon et procure à Le Corbusier l’émerveillement de ses volumes sous la lumière, mais celle d’Alger où Albert Camus passe son enfance entre la pauvreté de ses conditions d’existence et l’éclat de la ville et de son rivage.
Par sa manière de “ mordre dans le fruit doré du monde”, l’auteur de L’étranger nous fait sentir qu’une part de l’aventure de notre espèce n’est pas dépendante d’une médiation technique. Il nous permet de lire en creux ces formes d’appauvrissement de la vie sensible que nous risquons à vouloir coûte que coûte opérationnaliser le réel. Son émerveillement, la fragilité dont il sait faire preuve face aux saveurs de la terre et de la mer d’Alger nous incite à ne pas plus désincarner le monde vécu, à ne pas le transformer sans un minimum de précaution, en une techno-cité globale où nos corps se découvriraient étrangers, et dont la géométrie trop abstraite ne prendrait pas la mesure de dimensions ontologiques dégradées.

En Occident, la vision a infiltré les habitudes de perception, de pensée et d’action de la civilisation occidentale, instituant petit à petit un « paradigme occulocentré », une interprétation de la connaissance, de la vérité, de la réalité dominée par la vision.  Mais depuis quelques décennies émergent en différents endroits l’idée que notre relation à l’environnement se fonde sur une assise plus large et qu’il convient d’en interroger les contours. Cette nouvelle sensibilité irrigue de nombreuses productions architecturales, urbaines et paysagères contemporaines. Nous découvrirons sur quelles thématiques s’instaurent ces relations plus engageantes avec l’environnement construit. On a le sentiment que de nouvelles exigences aux milieux environnants émergent, outrepassant la simple appréciation par le regard et donnant plus d‘importance a tout ce qui dans la relation à l’environnent se tient à coté du visuel et du langage.

Cette conscience accrue aux questions environnementales passe nous le verrons par une acuité sensorielle et perceptive renouvelée, qui permette, espérons-le, de mettre en cohérence ce que l’on sait, ce que l’on sent et ce que l’on fait de la fragilité de notre installation terrestre en ce début de XXI siècle.

ISBN: 9782884747257

Nationalist invocations, democratic disenchantment, widespread creation of dehumanizing exclusion areas, populations kept on the margins even within their territories, inter-racial, intercultural and religious conflicts seen as avatars of civility. Our contemporary world demands that we look once again to hospitality—a hospitality yet to come, unknown, unnamable, which will certainly require an exercise in repositioning and displacing the concepts of subject, citi-zenship, humanity, politics, justice, borders, inside and outside. But this exercise of becoming-hospitality will require us to look back to [re]think the present and the future. Thus, thinkers such as Kant, Lévinas, Ricoeur, Arendt, Derrida, Rancière and others who dedi-cated themselves to theorizing about citizenship, the other’s right to exist, the idea of justice from the arrival of the other and with the other were called upon to help us think about an [im]possible re-enchantment of a hospitality that governments never cease to call into question by questioning its limits and virtue

Depuis que Walter Benjamin mentionnait dans son article « Expérience et pauvreté », la possibilité d’une pauvreté en expérience, ce terme n’a cessé de gagner en popularité. Il est aujourd’hui omniprésent. On ne vend plus des voitures, mais une expérience de conduite, on ne présente plus les attraits touristiques ou patrimoniaux d’une ville mais on propose des expériences culturelles et conviviales, on n’invite plus à venir faire ses courses dans tel ou tel magasin mais à partager une expérience shopping et même les visites au musée se doivent désormais d’être des expériences d’immersions interactives au contact des œuvres.
Conscient de cet état de fait, nous essaierons de tracer quelques chemins de traverse à partir de l’architecture. Il s’agit donc de dépasser l’agressivité et la nocivité des tels dispositifs et de conforter l’apport de l’architecture et son souci de relations épanouissantes au monde bâti, alors qu’une puissance de construction sans antécédent historique modèle de manière de plus en plus intensive nos univers quotidiens.

Dernier volet d’un long parcours scientifique, cet ouvrage poursuit l’interrogation menée par le laboratoire Gerphau sur la conception et la réalisation d’artefacts humains dans une perspective écologique. En convoquant le concept de synergie, qu’il applique aux domaines de l’architecture, de la ville, du paysage et du projet, ce volume introduit à de nouvelles méthodologies, plus ouvertes, en mesure de prendre en compte les phénomènes de transformation, coévolution et adaptation continue qui parcourent le monde urbain contemporain. Le faire-avec, le collectif ou le local sont ainsi érigés au centre d’une écosophierégénératrice des milieux habités.

347 pages
ISBN: 978-2-88474-725-7

Ville contre-nature

Éditions La Découverte - 2010

La modernité occidentale oppose la nature à la ville, cet univers artificiel, dans lequel ne subsistent que quelques éléments “naturels”, cultivés et entièrement maîtrisés par l’homme. Ce divorce entre l’humain et le vivant résulte de la montée en puissance des techniques déployées par l’homme, parfois contre lui et toujours contre la nature.

Les auteurs de ce livre – philosophes, historiens, géographes, artistes, architectes, paysagiste etc. – rejettent, vis-à-vis de la “nature”, l’approche dominatrice, et optent pour de nouvelles relations responsables et complices. Une telle attitude les oblige à repenser les rapports complexes entre nature et culture, entre technique et société, urbanisme et environnement et, par conséquent, à appréhender des dimensions éthiques et esthétiques de l’ “art de bâtir”. Les “espaces verts”, les jardins privés, les “coulées vertes”, les cités-jardins, les tracés “paysagés” des autoroutes ou des voies ferrées, les diverses réglementations écologiques, etc., sont-ils le signe d’une heureuse prise de conscience ou les cache-misères d’un hyper-libéralisme méprisant les équilibres fragiles de l’écosystème et le désir des citadin d’une “nature urbaine” ?

La nature n’est pas extérieure à l’homme, tout comme celui-ci n’est pas en dehors d’elle. Ce sont les conditions de cette nécessaire cohabitation que les auteurs étudient et discutent. Au-delà d’un discutable “contrat naturel”, il convient de prendre soin de “notre” monde, un monde résolument urbanisé.

288 pages
ISBN: 9782707130914
184 pages
ISBN: 978-2-707-16481-0

Au-delà de son acception triviale – se loger, résider à telle adresse ou dans tel quartier -, le terme “ habiter ” renvoie au rapport que l’homme entretient avec les lieux de son existence, mais aussi à la relation, sans cesse renouvelée, qu’il établit avec m’écoumène, cette demeure terrestre de l’être. “Habiter ” entremêle le temps et l’espace, et l’explorer revient à questionner l’histoire et la géographie d’une manière anthropologique en sachant que l’humain est un être parlant et fabriquant. Les auteurs de cet ouvrage confrontent ainsi les apports de différentes disciplines (architecture, sociologie, géographie, urbanisme, ethnologie, philosophie, …) à la compréhension de “ habiter ” et de l’ “habiter”. Ils témoignent de la très riche polysémie de ce verbe, source de débats contradictoires aux implications tant théoriques que pratiques. En effet si “ habiter ” est le propre de l’homme, alors pourquoi accepte-t-il trop souvent l’inhabitable ? Que signifie l’habitabilité de la Terre ? En quoi l’architecture et l’urbanisme contribuent-ils, ou non, à la rendre habitable ? Comment la qualité d’un lieu conforte-t-elle la beauté de l’existence ? Répondre à ces questions revient à analyser les tensions qui se manifestent entre l’homme, la technique et la nature et aussi les représentations qui en découlent. À l’heure de l’urbanisation planétaire, de la généralisation des réseaux techniques de communication et d’une certaine homogénéisation des rapports homme/nature, il est essentiel de penser ce qu’ “ habiter ” veut dire.

384 pages
ISBN: 978-2-7071-5320-3

Henri Maldiney

Éditions du Cerf - 2007

Philosophe majeur de notre époque, Henri Maldiney, né en 1912, a élaboré solitairement une phénoménologie consacrée à l’art et à la poésie (Cézanne, Tal Coat, Francis Ponge, du Bouchet, etc.). Il a contribué à la daseinanalyse, en y introduisant et discutant Ludwig Binswanger, et à une philosophie des sens (Erwin Straus). Remarquable lecteur des « classiques » grecs et allemands qu’il questionne sans cesse, il explore le mystère de l’existence humaine en allant à « la chose même » et en misant sur « l’ouvert », qui confère à l’humain son humanité.

224 pages
ISBN: 978-2-204-08367-6

Les architectures molles, sculptées, transparentes, immatérielle prétendent se libérer des contraintes géométriques, comme si la géométrie ne revendiquait que la droite et la forme orthogonale ou le cercle ! Certains architectes s’abandonnent aux “hasards” informatiques et construisent des édifices à la géométrie chahutée par un logiciel. Des urbanistes opposent encore plan radioconcentrique au plan en damier en ce qui concerne l’expansion des villes et, refusant d’imaginer d’autres morphologies, laissent faire la promotion immobilière, les opportunités foncières et le chacun pour soi.

La géométrie dans notre culture marquée par la philosophie grecque, est constitutive de l’architecture et de l’urbanisme. Elle est mise en débat par un jeu extraordinairement varié des formes et de leurs agencements, aussi bien que par des régulations qui donnent une mesure au monde et suscitent des questionnements quant à ce qui est à la mesure de l’existence. Depuis le simple pas jusqu’aux théories les plus sophistiquées, la géométrie – qui n’a jamais cessé de se complexifier depuis Pythagore ou Euclide jusqu’aux géométries algébrique, infinitésimale et variable – se rappelle à nous. C’est ce rappel qu’il nous faut entendre, comme une invitation à penser aussi bien notre corps que le paysage, aussi bien la maison que la ville et la cité.

Cet ouvrage collectif veut questionner géométriquement et philosophiquement l’urbain contemporain et les architectures qu’il provoque. En d’autres termes, Il espère saisir à partir de la confrontation entre mathématiciens, géomètres, historiens, architectes, urbanistes, paysagistes et philosophes l’expérience existentielle de l’espace-temps des lieux.

288 pages
ISBN: 2-7071-4469-0

L’Air, l’Eau, le Feu et la Terre interviennent grandement dans ce que Gaston Bachelard nommait l’ “imagination matérielle”. Et ils participent activement à la symbolique des lieux et à leur agrément. La confrontation transdisciplinaire proposée dans ce livre permet de saisir la présence de chacun des éléments – ou de leur ombre – dans la sensorialité d’une ville comme dans l’habitabilité d’une demeure.

L’on pourrait penser que l’architecture “transparente”, de plus en plus “dématérielle”, et l’urbain, de plus en plus déterritorialisé, ont rompu leurs liens avec les quatre éléments. Pourtant, comme le montrent les auteurs, des architectes, des paysagistes, des aménageurs s’évertuent à valoriser certaines qualités de ces éléments, sans être effrayés par leur virtualisation grandissante : des villes se dotent d’un lac artificiel, des jardins sont dédiés aux quatre éléments, des maisons honorent la terre et le urbanistes, à l’instar des philosophes grecs, prônent des tracés balayés par le vent.

À l’hygiénisme du siècle passé respectueux du “bon” air et de l’eau potable et précautionneux en matière d’incendie et de séisme, succède un esthétisme, parfois excessif, à base de l’un des quatre éléments … La copie, le faux, dénaturent les éléments et les “gadgétisent”. Il est temps de leur redonner leur puissance symbolique et de rappeler qu’ils sont constitutifs de notre histoire culturelle, et rassemblent les hommes, les paysages et les constructions dans un même monde.

216 pages
ISBN: 9782707138804

L’éthique, selon son éthymologie, est un ethos, c’est-à-dire une “manière d’être”. Séjour de l’homme au monde, elle est un mode d’existence qui s’adresse à chacun et se distingue aussi bien d’une morale comme rapport à soi que d’une pensée moralisatrice pour l’Autre. Ainsi l’éthique participe à la relation à autrui et au monde – à la Nature, à ce qu’on nomme bien hâtivement l’environnement. Elle se confond parfois avec la responsabilité, que nos actes ordianires ne peuvent pas esquiver, et la déontologie, qui règle les pratiques professionnelles. L’architecte et l’urbaniste, par exemple, sont non seulement responsables juridiquement de ce qu’ils édifient, mais éthiquement.

À l’heure où ces métiers connaissent de profondes mutations, à la suite des nouvelles configurations territoriales et des nouveaux modes de vie urbains, la question de l’éthique se pose avec acuité. Bâtir la demeure de l’homme, aménager ses lieux et ses sites, ne sont pas une mince affaire. Certes, de trop nombreux professionnels ne s’en soucient guère, préoccupés comme ils sont par “leur” oeuvre ou leur chiffre d’affaire … Pourtant, chaque jour, s’affirme l’idée selon laquelle il n’y a pas d’esthétique sans éthique.

Les auteurs de ce livre – architectes, urbanistes, philosophes, sociologues, juristes, historiens – explorent les implications de l’éthique pour les “faiseurs de ville”, ainsi que les interfaces entre opérations d’aménagement, pratiques démocratiques et exigences écologiques.

228 pages
ISBN: 2-7071-3303-5

Maison / Mégalopole

Thierry Paquot, Chris Younès, Alain CHARRE, Jean-Paul DOLLE et 10 autres
Les Éditions de la Passion - 1998

Quoi de commun entre maison et mégalopole ? L’étendue et la durée de l’existence humaine. Nous habitons dedans et dehors, la maison et la mégalopole, des territoires à échelles dilatées, distendues, entre familier et forme d’inconnu. Au-delà d’une analogie inopérante ou d’une opposition superficielle, c’est notre présence à nous-même et à autrui qui est en jeu dans ces deux pôles : domestique et public, microcosme et macrocosme, enracinement et mobilité. La question ne se pose pas en terme de choix, maison ou mégalopole, mais comme horizon conjoint. La maison est ancrage au monde, lieu de l’intériorité, du privé, du fini infini. Bachelard et Patocka en ont fait l’archétype de l’habiter originaire en ce qu’elle abrite la rêverie et ouvre à l’intimité. L’insistance de l’homme à rechercher une demeure, un « chez soi », est confrontée à l’heure de l’urbanisation planétaire, à de nouvelles territorialités. La mégapole, avec l’accélération et la superposition des déplacements et des communications, a déployé vertigineusement le dehors dans des espaces urbanisés proliférant sans centre ni périphérie : réseaux, virtualité, cyberespace, nomadisme, multiplient les occasions de rencontres instantanées dans l’espace d’un tohu-bohu éclaté, dilué, dématérialisé, amorphe.

193 pages
ISBN: 2-906229-32-6
528 pages
ISBN: 978-2-940406-94-4
414 pages
ISBN: ISBN: 978-2-940563-03-6

À Paris, un premier rendez-vous célébrait en 1985 la rencontre de l’architecture et de la philosophie. Architectes et philosophes étaient invités à discuter ensemble de la question suivante : comment la philosophie peut-elle saisir l’architecture au plus près de ce qui la détermine ?Qu’en est-il encore aujourd’hui quand il s’agit de trans-, re-, co-, alter-architectures ou de bio-, géo-, éco-sophies ? Comment ces enchaînements de préfixes questionnent-ils le sens de ces pratiques ? Quels sont les événements qui ont orienté, ré-orienté, parfois dés-orienté leurs récits, discours et fondements ? Qu’est-ce qui encore et toujours résiste et se transforme ?Il s’agit dans cet ouvrage qui rassemble diverses approches de mettre en débat ce qui participe à la tenue et à l’ouverture d’un monde.

242 pages
ISBN: 978-2-7056-9188-2

Bien sûr, l’expérience n’est pas une ligne droite ; elle est toujours et déjà constituée de tournants, de tourments et de retournements. Mais d’où vient cette intuition que ce tournant, aujourd’hui et maintenant, mérite de s’y arrêter pour le penser ?

 

Au croisement de l’architecture et de la philosophie, nous avons invité des auteurs à rendre compte de la diversité des trajectoires de pensée et des actions, multipliant ainsi les prises et reprises pour interroger ce qui se construit et partager ce qui nous arrive.

276 pages
ISBN: 9782705695705

Dans Art et existence, Maldiney déclare : « Pour nous, habiter, c’est exister. » Le présent ouvrage tend à déplier, prolonger, articuler et épaissir ce postulat en entrelaçant architecture, ville, paysage, littérature et philosophie. Il reprend les lignes synergiques d’un travail de recherche de longue haleine mené dans une perspective écosophique. Une telle attitude explore un art d’exister dans la multiplicité, la singularité et l’ouverture, en manifestant le caractère critique par une réinterprétation des nouages des trajectoires du temps, de l’humanité et de son devenir. Insister sur ce qui est entre les choses et les êtres comme sur ce qui advient, régénérer, recycler, revivifier, économiser, diversifier, ménager, recréer, méditer…, autant d’écorythmes d’un autre type entre humain et non-humain, pour s’envisager au monde.

158 pages
ISBN: 9782705697266