Plus qu‘à la mesure impartiale des objets qu’une certaine géométrie utilise pour intervenir sur l’espace, nous nous intéresserons dans les pages qui suivent, à la mesure de notre relation aux lieux. Nous retournerons pour cela au contact de la lumière méditerranéenne, non pas celle qui baigne le Parthénon et procure à Le Corbusier l’émerveillement de ses volumes sous la lumière, mais celle d’Alger où Albert Camus passe son enfance entre la pauvreté de ses conditions d’existence et l’éclat de la ville et de son rivage.
Par sa manière de “ mordre dans le fruit doré du monde”, l’auteur de L’étranger nous fait sentir qu’une part de l’aventure de notre espèce n’est pas dépendante d’une médiation technique. Il nous permet de lire en creux ces formes d’appauvrissement de la vie sensible que nous risquons à vouloir coûte que coûte opérationnaliser le réel. Son émerveillement, la fragilité dont il sait faire preuve face aux saveurs de la terre et de la mer d’Alger nous incite à ne pas plus désincarner le monde vécu, à ne pas le transformer sans un minimum de précaution, en une techno-cité globale où nos corps se découvriraient étrangers, et dont la géométrie trop abstraite ne prendrait pas la mesure de dimensions ontologiques dégradées.