Dans un contexte de prise de conscience des dérèglements écologiques et climatiques, il s’agirait de réinventer la ville pour réinventer la manière dont les sociétés habitent la terre. Si l’urbanisation est désormais associée à l’une des causes principales de ces crises, l’urbanisme se voit être reproblématisé comme l’un des secteurs majeurs pour en contrer les conséquences, qui a dorénavant pour mission de maintenir les conditions d’habitabilités de la planète pour l’ensemble du vivant.
Cette thèse étudie ce que l’écologisation fait aux pratiques du projet urbain. Elle se concentre sur les trajectoires politiques d’entités ou de phénomènes naturels, traquées dans une démarche de participation-observante au cours de trois processus de projet urbain. A partir d’une immersion de quatre années au sein d’une agence d’architecture et d’urbanisme, ce travail propose de saisir (1) ce que font ces natures urbaines et ce qu’on leur fait dire, (2) ce qu’elles font faire en retour, notamment aux concepteur·rices et in fine (3) au sein de quels autres intérêts elles se retrouvent mêlées.
L’enrôlement d’une multitude d’acteurs autour de communautés plus qu’humaines fait apparaître la nature comme une catégorie politique qui mêle des pratiques, des morales, des conceptions du juste, des normes concurrentes. L’injonction adressée aux architectes de « faire avec les dynamiques du vivant » recompose leurs relations socio-professionnelles, leurs régimes d’attention et leurs outils, tout en perturbant le paradigme techniciste de domination sur le non-humain qui caractérise la discipline. Si l’urbanisme écologisé se trouve face à d’autres impératifs, il peut constituer une énième opération marketing de la ville néolibérale tout comme une opportunité pour réinvestir, encore, la nature politique de l’activité de projet.