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Chercheur

Pierre Bouilhol

architecte / docteur en architecture et urbanisme
théories et pratiques du projet, écologisation, ethnographie, politique
Pierre Bouilhol est architecte et docteur en architecture et urbanisme (cotutelle entre l'Université Paris 8 et l'Université libre de Bruxelles). Il est chercheur associé au laboratoire Sasha (Faculté d'architecture La Cambre-Horta de l'Université libre de Bruxelles), maître de conférences associé à l'ENSA Paris-La Villette et coordinateur de la Plateforme de recherche de l’agence d’architecture et d’urbanisme ANMA. A partir de démarches d'enquêtes qui mêlent archives et ethnographies, ses recherches portent sur l'écologisation des pratiques du projet.

Travaux

Dans un contexte de prise de conscience des dérèglements écologiques et climatiques, il s’agirait de réinventer la ville pour réinventer la manière dont les sociétés habitent la terre. Si l’urbanisation est désormais associée à l’une des causes principales de ces crises, l’urbanisme se voit être reproblématisé comme l’un des secteurs majeurs pour en contrer les conséquences, qui a dorénavant pour mission de maintenir les conditions d’habitabilités de la planète pour l’ensemble du vivant.

Cette thèse étudie ce que l’écologisation fait aux pratiques du projet urbain. Elle se concentre sur les trajectoires politiques d’entités ou de phénomènes naturels, traquées dans une démarche de participation-observante au cours de trois processus de projet urbain. A partir d’une immersion de quatre années au sein d’une agence d’architecture et d’urbanisme, ce travail propose de saisir (1) ce que font ces natures urbaines et ce qu’on leur fait dire, (2) ce qu’elles font faire en retour, notamment aux concepteur·rices et in fine (3) au sein de quels autres intérêts elles se retrouvent mêlées.

L’enrôlement d’une multitude d’acteurs autour de communautés plus qu’humaines fait apparaître la nature comme une catégorie politique qui mêle des pratiques, des morales, des conceptions du juste, des normes concurrentes. L’injonction adressée aux architectes de « faire avec les dynamiques du vivant » recompose leurs relations socio-professionnelles, leurs régimes d’attention et leurs outils, tout en perturbant le paradigme techniciste de domination sur le non-humain qui caractérise la discipline. Si l’urbanisme écologisé se trouve face à d’autres impératifs, il peut constituer une énième opération marketing de la ville néolibérale tout comme une opportunité pour réinvestir, encore, la nature politique de l’activité de projet.

À l’heure d’une intensification des controverses socio-environnementales autour de projets d’aménagement, une nouvelle forme de militantisme anticapitaliste émerge depuis des « zones à défendre » (ZAD). Ces mobilisations remettent en cause l’intérêt général promu en résistant contre de « grands projets inutiles et imposés ». À l’heure des dérèglements multiples, à la fois locaux et globaux, de plus en plus de conflits opposent des écologistes à d’autres écologistes. Cette enquête propose de cartographier l’histoire, les régimes narratifs et les effets d’une mobilisation socio-environnementale : celle du « quartier libre des Lentillères » en lutte contre la deuxième tranche du projet d’« écocité Jardin des maraîchers » à Dijon. Après avoir précisé les histoires à l’origine des représentations concurrentes de ce sol contesté, selon la perception qu’en ont les acteurs, l’article se concentre sur les régimes narratifs de la mobilisation ainsi que sur sa réception auprès des professionnels de l’urbain. Cette mobilisation peut être considérée comme une mise au travail vivante de la pensée écologique, un laboratoire de l’habiter qui trouble la pratique des architectes urbanistes, mais peut aussi représenter une opportunité originale pour réinterroger l’activité de projet à l’heure du nouveau régime climatique.