Anaëlle Mahéo est diplômée d’état en architecture de l’ENSA Nantes (2016) ; diplômée du DPEA Recherches en architecture à l’ENSA Paris la Villette en immersion au laboratoire Gerphau (2017) ; Docteure en architecture et ville diplômée de l’université Paris Nanterre (2024).

Anaëlle Maheo
Présentation
Travaux

L’architecture est un processus complexe qui fait réfléchir à la fois sur la fabrication technique d’un objet et sur la transformation que celui-ci opère sur un monde de perceptions. Pour comprendre l’architecture comme processus d’organisation de ce monde, cette thèse s’inscrit dans une démarche de théorisation exploratoire. Il s’agit d’interroger la notion de passage qui, par sa polysémie et sa plasticité, peut donner du sens aux expériences perceptives : à la fois mouvement, action de passer, temps vécu, espace de friction, seuil, changement d’état et devenir, le « passage » admet une certaine complexité et une poétique singulière. Nous proposons de le considérer comme une condition et une raison d’être de l’architecture. En effet, cette condition de l’émergence de l’architecture se situerait dans les actions qu’elle permet, dans le fondement des possibilités de transformation de l’expérience. La condition passante ferait émerger l’architecture en acte. Comment constituer un concept de passage opérant pour le système de pensée qu’est l’architecture ? Ce travail théorise la condition passante de l’architecture à partir de cinq figures du passage : la marge, la traversée, le seuil, la ritournelle et l’archipel. Chacune de ces figures est explorée à la croisée de pensées de différents auteurs et disciplines (notamment en philosophie, anthropologie, littérature, architecture et paysage) et éprouvée par une action située : la mise en récit d’expériences architecturales et urbaines. Ces explorations nous permettent de déceler des situations de passage qui alimentent nos réflexions. En prenant pour hypothèse que le passage infuserait toutes les vies de l’objet architectural, les pratiques et les actions sur cet objet, il convient de rechercher la condition passante à la fois dans le processus de projet et dans l’espace vécu et perçu. Cette théorisation exploratoire de la condition passante repose donc sur une méthode singulière de mise en récit, que nous avons ancrée dans un cadre tant théorique (la phénoménologie) que pratique (CIFRE dans l’agence d’architecture Daquin Ferrière & Associés).

L’architecture étant liée à l’habiter, nous avons cherché à la comprendre à travers l’expérience de la banalité, en racontant des situations ordinaires, à la première personne. La mise en récit met alors en exergue les relations que nous entretenons avec les lieux, au quotidien. L’objectif de cet article est de présenter brièvement le cadre méthodologique de cette expérimentation en lien avec l’expérience de la banalité, puis de partager des extraits de ces récits pour enfin proposer une part d’analyse de ces pratiques quotidiennes racontées. Nous nous demanderons quels rôles jouent ces pratiques mouvantes de l’espace dans le processus répétitif du quotidien. Le récit d’espace lui-même pourrait être vu comme un acte d’architecture, rendant le territoire expressif et habité. Ce développement reprend en partie un travail réalisé pour notre thèse soutenue en 2024.
Mots-clés : récit, habiter, expérience, infra-ordinaire, pratiques d’espace, quotidianisation, opération de bornage
